Maître Franck Morel, 44 ans, ancien Inspecteur du Travail puis Directeur adjoint du cabinet du ministre du Travail, est avocat associé du Cabinet Barthélémy Avocats depuis janvier 2012.
Il a participé à l’élaboration de plus d’une douzaine de lois et notamment de celle du 25 juin 2008 portant modernisation du marché du travail et qui a posé un cadre légal pour le portage salarial, du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail et celle du 20 juillet 2011 portant réforme de la médecine du travail.
Il est également auteur de trois ouvrages :
C’est une réaction positive. Cette extension consolide les conditions d’exercice du portage salarial. Juridiquement, il faut évaluer les contours et les modalités de cette extension. Certaines dispositions ne seront pas forcément étendues par l’arrêté.
Il est évident qu’il faudra parachever cette extension qui apporte plus de sécurité juridique et ceci de manière assez complète par un certain nombre de modifications dans l’arsenal normatif.
En 2010, au moment de la signature de l’accord, le contexte était très particulier. Il faut pour le mesurer revenir aux origines de la législation du portage.
En effet, déjà en 2008, l’insertion du portage salarial dans le Code du travail par l’article 8 du projet de loi du 25 juin 2008 n’était pas si évidente. En amont de la loi, une vigoureuse opposition s’était manifestée de la part de plusieurs acteurs contre le fait que ce soit le PRISME, fédération des entreprises de travail temporaire, qui représente dans une négociation à venir les intérêts du portage.
Puis à l’Assemblée nationale mais également au Sénat, les débats furent houleux. Ces débats ont laissé des traces, une certaine crispation entre le monde de l’intérim et une partie du monde du portage, un climat parfois de méfiance. La controverse portait notamment sur la représentativité du PRISME vis-à-vis des trois fédérations du portage salarial ayant des positions par ailleurs « éclatées ».
En réalité, jusqu’en 2010, l’article du Code du travail qui a été inséré constituait le support normatif du portage salarial alors que cette forme d’activité qui existait depuis les années 80 n’avait reposé jusqu’alors sur aucune assise législative.
Le 24 juin 2010, la date de signature de l’accord professionnel correspond très exactement à la fin de la période des deux ans prévue pour la négociation entre les partenaires sociaux. Après sa signature, les passions se sont à nouveau exprimées avec notamment des exemples de grèves de la faim ! Le climat n’était pas du tout apaisé et il a donc fallu prendre le temps de l’échange et de la pédagogie.
L’accord participe d’un meilleur encadrement du portage, notamment dans sa dimension qualitative. C’est une étape qui complète la loi décisive du 25 juin 2008. La réponse aux attentes de sécurisation du mécanisme est primordiale.
Il y aura certainement d’autres étapes pour compléter encore cet édifice, dans la même logique.
L’accord promeut un certain modèle de portage salarial. Un portage essentiellement concentré sur des prestations intellectuelles, refusant le portage salarial pour les activités de services à la personne. C’est un choix d’encadrement important.
Ce modèle va amener les acteurs économiques à devoir choisir le bon levier juridique pour avoir recours à des prestations de services en fonction de la nature des activités.
Quand doit-on avoir recours à un auto-entrepreneur, au portage salarial, à un groupement d’employeurs, à une convention d’appui au projet d’entreprises, à une mise à disposition de personnel ?
Désormais les entreprises disposeront d’une boite à outils utile pour tous. Les outils différents du portage salarial permettront d’apporter des réponses complémentaires et à chaque besoin des réponses différentes.
Ces deux accords constituent indéniablement des étapes positives dans la voie d’un fonctionnement plus fluide du marché du travail.
Néanmoins, leur effet va sensiblement dépendre des pouvoirs publics et du juge.
Si l’ANI du 11 janvier 2013 peut apporter plusieurs progrès dans l’organisation des licenciements économiques collectifs par exemple, plusieurs questions restent en suspens notamment sur les procédures et pouvoirs d’homologation de l’administration dans ce contexte
Je recommanderais à mes clients une utilisation du portage lorsque les compétences recherchées relèvent de prestations intellectuelles, avec un besoin de souplesse dans l’organisation du service rendu, le portage ayant vocation à être utilisé principalement dans pour ce type de prestations.
Je recommanderai également le portage à un prestataire qui exprime un besoin d’autonomie conjugué à un besoin de « sécurité salariale ».
Enfin, pour faire son choix d’une entreprise de portage salarial, je pense, de façon générale, que l’existence d’un dialogue social organisé et mûr est un gage de progrès et de qualité dans les relations de travail.