Tomber malade en plein milieu de ses vacances est une mésaventure que redoutent de nombreux salariés. Jusqu’à récemment, cela signifiait perdre irrémédiablement des jours de congé précieux. Mais un arrêt récent de la Cour de cassation vient bouleverser cette situation : désormais, les salariés français peuvent reporter leurs congés payés s’ils tombent malades pendant leurs vacances. Ce changement aligne le droit français sur les exigences du droit européen. Toutefois, cette nouvelle possibilité s’accompagne de règles strictes à respecter, sous peine de lourdes sanctions.

Une mise en conformité avec le droit européen

Ce tournant juridique découle d’un arrêt de la Cour de cassation publié en septembre 2025. Celui-ci vise à harmoniser le droit français avec celui de l’Union européenne, qui distingue clairement le congé payé, destiné au repos et aux loisirs, du congé maladie, dont l’objectif est la guérison. En effet, un salarié malade pendant ses vacances n’est plus en capacité de bénéficier pleinement du repos auquel il a droit. Il est donc logique que les jours de congé non « consommés » pour cause de maladie soient reportés.

Conditions à respecter pour reporter ses congés

Pour bénéficier de ce droit au report, le salarié ne peut pas simplement déclarer être malade. Il doit impérativement suivre une procédure bien définie :

  1. Consulter un médecin durant la période de congés.
  2. Obtenir un arrêt de travail prescrit par ce médecin.
  3. Transmettre l’arrêt à son employeur dans un délai de 48 heures, comme le prévoit le droit du travail en cas d’arrêt maladie.

Cette démarche fait basculer le salarié de son statut de congé à celui d’arrêt maladie, ce qui implique de nouvelles obligations.

Droits au report : combien de temps pour reposer ses congés ?

Les jours de congé « perdus » à cause de la maladie ne sont pas annulés : ils sont recrédités sur le compteur de congés payés. Le salarié disposera alors du même délai que pour ses congés classiques pour les poser. Cela permet d’assurer que le salarié bénéficie pleinement de ses droits au repos, conformément aux finalités du congé payé.

Des obligations strictes en cas d’arrêt maladie

Être en arrêt de travail, même pendant une période initialement prévue pour les vacances, n’exonère pas des obligations habituelles liées à ce statut. L’arrêt de travail précise si le salarié est autorisé à sortir, et dans quelles conditions :

  • Sorties interdites (repos strict)
  • Sorties autorisées à certaines heures
  • Sorties sans restriction

En cas de non-respect de ces conditions, les conséquences peuvent être sévères : suppression des indemnités journalières de la Sécurité sociale, perte du complément versé par l’employeur, voire obligation de rembourser les sommes perçues indûment.

Contrôles renforcés pour limiter les abus

Les autorités comme les employeurs intensifient les contrôles pour lutter contre les arrêts maladie de complaisance. Des salariés ont ainsi été sanctionnés pour avoir effectué des activités incompatibles avec un arrêt maladie : travaux de peinture, jardinage, réparation de véhicule, etc.

Arnaud Teissier, avocat spécialisé en droit du travail, rappelle que cette nouvelle règle ne doit pas être détournée. « Le salarié réellement malade doit être protégé, mais les abus nuisent aux entreprises, notamment dans les secteurs déjà sous tension », souligne-t-il.

Une décision qui inquiète les employeurs

Si cette évolution est saluée par les défenseurs des droits des salariés, elle suscite une vive inquiétude du côté des employeurs. Le Medef et la CPME dénoncent un arrêt « absurde », estimant qu’il risque d’aggraver l’absentéisme et de fragiliser davantage les entreprises, qui devront absorber de nouveaux coûts liés aux absences prolongées.

Les directeurs des ressources humaines soulignent que les arrêts non justifiés alourdissent la gestion du personnel et nuisent à l’organisation interne. Pour certains secteurs, cette souplesse juridique pourrait devenir une charge financière et opérationnelle difficile à supporter.