Alors que 2026 approche, les perspectives d’augmentation de salaires s’annoncent plus que mesurées pour les salariés français. Entre incertitudes politiques, contexte économique morose et inflation contenue, les entreprises font preuve de prudence. Mais quelles seront les conséquences concrètes sur votre fiche de paie ? Éclairage complet sur les prévisions salariales pour l’année à venir.

Une tendance à la modération : hausse moyenne autour de 2 %

Selon plusieurs cabinets de conseil et de recrutement interrogés, les augmentations salariales pour 2026 devraient avoisiner les 2 % en moyenne. Une baisse notable par rapport à 2025, où les hausses s’établissaient à 2,5 % pour les ouvriers, employés, techniciens et agents de maîtrise (OETAM), et 2,3 % pour les cadres, d’après les données du cabinet Deloitte.

Khalil Ait Mouloud, directeur des enquêtes de rémunération chez WTW, parle d’une « tendance modérée » pour 2026, marquant un retour à la normale pré-Covid, après plusieurs années de revalorisations plus dynamiques liées à l’inflation.

Un contexte économique et politique incertain

Le ralentissement prévu s’explique en grande partie par un environnement économique fragile et des incertitudes politiques fortes. La chute du gouvernement Bayrou suivie de la nomination de Sébastien Lecornu à Matignon a renforcé les doutes des dirigeants quant à la stabilité de la feuille de route gouvernementale.

Seules 40 % des entreprises interrogées à l’été 2025 avaient déjà défini leur budget d’augmentations pour 2026, selon Deloitte. Et ces projections restent sujettes à révision, selon Khalil Ait Mouloud.

Une inflation en recul : moins de pression sur les salaires

Autre facteur clé : l’inflation attendue à seulement 1,4 % en 2026 selon la Banque de France. Ce recul allège la pression sur les entreprises, qui n’ont plus à ajuster massivement les salaires comme lors des pics inflationnistes des années précédentes. Delphine Landeroin, du cabinet LHH, évoque ainsi un « retour à la normale », les hausses exceptionnelles des années post-Covid n’étant plus nécessaires.

Des secteurs plus généreux que d’autres

Si la tendance globale est à la modération, certains secteurs résistent mieux. Grâce à une bonne santé financière ou des carnets de commandes à long terme, certains domaines se montrent plus disposés à récompenser leurs salariés :

  • Grande consommation (notamment le luxe et les spiritueux)
  • Industrie automobile
  • Énergie
  • Industrie pharmaceutique
  • Banques, assurances et mutuelles
  • Aéronautique, protégé par une planification à long terme

À l’inverse, les secteurs publics, du BTP ou encore des transports devraient afficher les hausses les plus faibles.

Des métiers en tension : des hausses ciblées jusqu’à +12 %

Malgré la morosité ambiante, certains profils très demandés bénéficieront de hausses notables :

  • Les ingénieurs en cybersécurité : jusqu’à +7 % en début de carrière.
  • Les ingénieurs en électronique embarquée : entre +7 et +12 %, selon l’expérience.
  • Les techniciens de maintenance : au-delà de +5 %.

Les profils spécialisés en intelligence artificielle sont également très recherchés, dans un contexte de pénurie de compétences. Ce phénomène rappelle les fortes tensions observées dans les métiers de la data entre 2015 et le début des années 2020.

En revanche, d’autres métiers auparavant très en vogue, comme les développeurs web ou les spécialistes de la RSE, voient leur attractivité salariale ralentir.

Moins de marge pour les avantages salariaux

Pour compenser des hausses de salaire limitées, les entreprises ont ces dernières années misé sur des avantages annexes : participation accrue aux frais de santé, augmentation du montant des titres-restaurants, prise en charge du transport, etc.

Mais en 2026, les marges de manœuvre seront plus réduites. Selon Delphine Landeroin, « les employeurs ont déjà beaucoup investi sur ces leviers en réponse à l’inflation » et auront du mal à aller plus loin.

Une révolution en vue : la transparence des salaires

Une échéance déterminante se profile pour les entreprises : la transposition de la directive européenne sur la transparence des rémunérations, prévue d’ici juin 2026. Ce texte obligera notamment les employeurs à afficher, dès l’offre d’emploi, le salaire proposé ou une fourchette précise.

Ce changement pourrait rebattre les cartes au sein des organisations. En découvrant les niveaux de salaires proposés aux nouvelles recrues, certains collaborateurs déjà en poste pourraient revendiquer des rattrapages. Une partie des entreprises anticipe déjà cette situation en allouant un budget dédié à l’égalité salariale, même si, en 2025, cela ne concernait que 28 % d’entre elles, avec un effort médian de 0,2 % des salaires de base.

2026, année de transition pour les salaires

2026 sera marquée par un retour à une dynamique plus contenue après plusieurs années d’ajustements exceptionnels. Si la majorité des salariés devront se contenter de hausses modérées, les profils en tension ou appartenant à des secteurs en croissance continueront de tirer leur épingle du jeu.

Enfin, la future directive sur la transparence salariale pourrait introduire de nouveaux rapports de force dans les négociations, incitant les entreprises à davantage d’équité… et à une gestion plus stratégique de leurs politiques de rémunération.