Alors que François Bayrou a dévoilé un plan budgétaire drastique pour 2026, les inquiétudes se multiplient quant à ses répercussions sur l’emploi. Derrière les chiffres de rigueur annoncés par le Premier ministre, c’est la question du chômage qui cristallise les débats parmi les économistes. Ce plan, qui ambitionne de redresser les finances publiques à hauteur de 44 milliards d’euros, pourrait, selon certains experts, ralentir l’activité économique et aggraver la situation du marché du travail.
Un plan de rigueur en ligne avec les engagements européens
Conformément au plan structurel à moyen terme (PSMT) transmis à Bruxelles, le gouvernement prévoit un effort budgétaire majeur : réduction des dépenses publiques, gel des prestations sociales et des retraites, ainsi qu’une « année blanche » sans revalorisation du barème de l’impôt sur le revenu. Cette mesure phare, équivalente à 7 milliards d’euros, pèsera directement sur le pouvoir d’achat des ménages.
Si cette stratégie budgétaire est saluée pour sa rigueur, elle est également perçue comme potentiellement récessive. Plusieurs économistes alertent sur ses conséquences sur l’emploi, en particulier dans un contexte où la croissance reste fragile.
Une croissance atone, un chômage en hausse ?
Selon l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), les mesures prévues devraient entraîner une baisse de la croissance de 0,6 % en 2026, limitant l’augmentation du PIB à seulement 1 %. La Banque de France partage cette estimation. Une croissance aussi modeste pourrait se révéler insuffisante pour créer des emplois en nombre suffisant, voire entraîner une hausse du chômage.
Eric Heyer, directeur du département analyse et prévision de l’OFCE, souligne que le choc d’activité attendu « contribuera à faire augmenter le chômage ». En effet, un resserrement budgétaire freine généralement la demande, ce qui se répercute mécaniquement sur l’emploi, en particulier dans les secteurs sensibles à la consommation des ménages.
Un risque d’amplification des inégalités sur le marché du travail
Les effets du plan ne seront pas uniformes. Les catégories les plus précaires, déjà exposées au chômage structurel, pourraient être les plus touchées. La réduction du pouvoir d’achat des foyers modestes, combinée à une baisse des prestations sociales, risque de fragiliser davantage leur insertion sur le marché du travail.
Par ailleurs, les retraités à faibles revenus verront leurs pensions gelées, sans rattrapage de l’inflation. Si certains retraités imposables profiteront du remplacement de l’abattement de 10 % par une déduction forfaitaire de 2.000 euros, ceux percevant de petites pensions n’auront pas cette « compensation », aggravant les disparités sociales et économiques.
Une stratégie contestée par certains économistes
Si le gouvernement affirme que ce plan n’entame pas la compétitivité des entreprises, plusieurs experts, comme Maxime Darmet (Allianz Trade), critiquent l’absence de véritables réformes structurelles susceptibles de soutenir l’emploi à long terme. Pour lui, « près de la moitié du plan repose sur des hausses de prélèvements obligatoires », ce qui pourrait freiner l’investissement privé et donc les créations d’emplois.
En outre, Bruno Cavalier, chef économiste chez Oddo-BHF, met en garde contre de « grands risques d’exécution » et l’impact politique du plan. Des ajustements ou compromis pourraient en atténuer l’efficacité, tout en prolongeant l’incertitude, un facteur qui pèse aussi sur l’embauche.
Le plan Bayrou va-t-il freiner la reprise de l’emploi en France ? Si certains économistes restent confiants sur la résilience du marché du travail, d’autres craignent que le resserrement budgétaire ne vienne casser une dynamique déjà fragilisée par une croissance molle et un environnement international instable.
À l’heure où le gouvernement mise sur la réduction du déficit pour retrouver la confiance des marchés et de Bruxelles, la facture pourrait bien être sociale. Et le chômage, une fois encore, en faire les frais.