Les partenaires sociaux sont réunis jusqu’à la mi-novembre autour de la construction de la nouvelle convention d’assurance chômage. Une première divergence est apparue durant la réunion du 4 octobre, qui a lancé les débats concernant le sujet hautement sensible des seniors. Alors que le Medef souhaite avancer sur l’impact du report de l’âge légal de départ à retraite sur la situation financière de l’Unédic, les organisations syndicales veulent attendre les résultats des discussions concernant l’emploi des salariés âgés.

Les mesures d’économie pour l’assurance chômage proposées par le patronat

Lors de la quatrième rencontre des partenaires sociaux portant sur les conséquences de la réforme des retraites, les syndicats salariés ont demandé à connaitre l’issue de la conférence sociale et de la grande négociation sur l’emploi des seniors avant de poursuivre. Le patronat, quant à lui, refuse de renvoyer la question de l’allongement de la durée d’activité à plus tard, invoquant les dispositions de la lettre de cadrage imposée par le gouvernement.

Les enjeux à discuter sont liés au relèvement de l’âge légal de départ à la retraite à 64 ans au lieu de 62 ans.

Le Medef, la CPME et l’U2P sont pressés de mettre en place des mesures favorisant le retour rapide à l’emploi des salariés seniors au chômage, mais surtout permettant d’alléger les charges du régime d’assurance chômage.

Ils proposent ainsi de reculer également de deux ans l’âge d’éligibilité aux durées maximales d’indemnisation des demandeurs d’emploi. Ainsi, les 30 mois de prise en charge ne seraient possibles qu’à partir de 59 ans au lieu de 57 ans. De même, il faudra attendre 55 ou 56 ans pour prétendre aux 22,5 mois d’indemnisation aujourd’hui accordés aux chômeurs âgés de 53 et 54 ans. Si l’économie potentielle pour l’Unédic pourrait atteindre 270 millions, ce report de l’âge priverait 150 000 personnes de droit.

Sur le même principe, l’âge de suppression de la dégressivité de 30 % de l’allocation au-delà de six mois d’indemnisation serait relevé à 59 ans et non 57, en visant une économie de 50 millions d’euros. Enfin, le seuil pour bénéficier du maintien de l’allocation jusqu’à 67 ans passe de 62 ans à 64 ans pour les demandeurs d’emploi qui ne satisfont pas aux critères de la retraite à taux plein.

L’arrêt du financement public des plans de départs volontaires réclamé par les employeurs

Hubert Mongon, le chef de file de la négociation pour le patronat, fustige par ailleurs le financement public des plans de départs volontaires.

Il pointe du doigt le fait qu’au cours des trois dernières décennies, l’assurance chômage ait dû prendre en charge la rémunération des salariés seniors partis avant terme jusqu’à l’âge de leur départ à la retraite.

Il réclame ainsi l’arrêt des accords de départs volontaires par les entreprises qui souhaitent se défaire de leurs salariés âgés.

Eric Chevée, vice-président de la CPME, abonde dans son sens, dénonçant les dérives progressives de l’assurance chômage et le financement des fins de carrières par la collectivité.

Les représentants patronaux soulèvent également la nécessité d’adopter des règles plus incitatives à la reprise d’un travail. Le ministre du Travail envisage notamment l’ajustement des modalités de cumul de l’allocation chômage et des revenus d’activité, afin de favoriser les travailleurs.

Faute de décrocher un poste salarié, de nombreux professionnels seniors, notamment des cadres, ont d’ailleurs opté pour le cumul du chômage et portage salarial.

Cette forme d’emploi en plein essor leur permet d’effectuer des missions à temps partiel auprès d’entreprises de toute taille et de tous secteurs.

Ils partagent ainsi une expertise et une expérience précieuses tout en bénéficiant d’une grande liberté et d’une protection sociale complète.

Les syndicats salariés pas prêts à discuter du sujet des seniors dans le cadre de l’assurance chômage

Les organisations de salariés rétorquent que les plans de départs volontaires sont lancés à l’initiative des entreprises. Elles réclament ainsi de ces dernières qu’elles apportent la preuve de leur intention de maintenir les seniors en emploi avec « des actes et des propositions » avant d’aller plus loin dans les discussions autour des conséquences de l’allongement de la durée d’activité en matière d’assurance chômage.

Observant un faible taux d’emploi des 60-62 ans, surtout dans l’industrie, les négociateurs doutent que ces derniers consentent à maintenir ces derniers en activité jusqu’à 64 ans. Denis Gravouil de la CGT dénonce l’utilisation par les employeurs de l’assurance chômage comme « outil de pré-retraite ».

Les syndicats salariés dénoncent en outre une stratégie des employeurs qu’ils qualifient de « dilatoire ». En effet, repousser les limites d’âge de deux ans pourrait générer des économies permettant une réduction des taux de cotisation à l’assurance chômage.

Une analyse effectuée par l’Unédic pour le compte de la CPME montre que si le taux de cotisation patronale chômage pour les travailleurs de plus de 60 ans passait de 4,05 % à 4 %, le manque à gagner s’élèverait à 200 millions annuellement pour l’assurance chômage.