Le statut de travailleur détaché – qui s’applique aux salariés envoyés d’un pays de l’Union européenne à un autre au gré des contrats – qui est en constante augmentation, est régulièrement accusé d’encourager le dumping social.

Focus sur une facette inconnue mais pourtant positive de l’avant-projet de loi El Khomri, qui projette de renforcer les procédures de contrôle et de créer un « droit de timbre ».

Le travail détaché, une pratique en augmentation

Ce statut assez particulier de travailleur détaché est défini par la directive européenne du 16 décembre 1996 : « un travailleur est considéré comme détaché s’il travaille dans un Etat membre de l’UE parce que son employeur l’envoie provisoirement poursuivre ses fonctions dans cet Etat membre ».

C’est typiquement le cas quand un prestataire de services remporte un contrat dans un autre pays et décide d’envoyer ses employés exécuter ce contrat sur place.

Le détachement de salariés entre pays européens concernerait environ 1,5 millions de personnes par an. Ce nombre est d’ailleurs en constante augmentation, puisque 230 000 travailleurs détachés ont été déclarés en 2014, contre 212 600 en 2013.

De la dérégulation à la re-régulation

Bon marché, flexible, cette main d’œuvre bénéficiant de la liberté de circulation garantie par le droit de l’Union Européenne pose néanmoins un problème.

En effet, bien que les règles de la protection sociale française en cours s’appliquent à ces contrats – les travailleurs doivent ainsi toucher au minimum le SMIC – les cotisations sociales restent exigibles dans le pays d’origine, nourrissant des accusations de dumping social et de perte de recettes pour l’Etat français.

En particulier car, comme le soulignait le rapport parlementaire Savary en 2013, le contournement de ces règles par des montages frauduleux complexes rend la directive européenne « insuffisante et largement inefficace ».

D’après les chiffres du rapport, les salariés détachés en France d’origine européenne sont en majorité polonais (19%), français (13%), portugais (environ 11%) et roumains (11%). Le même rapport note que les principaux secteurs concernés sont la construction (33%), l’industrie (25%) et le travail temporaire (20%).

L’augmentation des dérives, la transformation progressive du statut de travailleur détaché à celui de travail caché, a rendu nécessaire une re-régulation.

La loi El Khomri souhaite renforcer les contrôles, dont l’effet est pour l’instant illusoire, le temps administratif étant relativement déconnecté de celui du travailleur détaché, par nature fugace.

Probablement un des aspects du projet les plus sensés, qui n’est bizarrement absolument pas commenté.