Le 14 mai dernier, dans le cadre de sa semaine du Digital, le Groupe ITG a organisé un afterwork réunissant des experts du numérique autour du thème : Comment le digital révolutionne nos façons de travailler ? Retour sur une soirée riche en échanges et débats.

Stephane Boukris et Baptiste Broughton lors de l'Afterwork ITG du 14 mai 2014Baptiste Broughton de Neo-Nomade et Stéphane Boukris lors de l’Afterwork ITG du 14 mai 2014

Les interventions des entrepreneurs du numérique

Patrick Levy-Waitz, Président d’ITG et de la Fondation ITG :

Pour l’introduction de la soirée, M. Levy-Waitz a insisté sur le fait que le net a profondément changé les pratiques et les perceptions du travail. Il a opéré une remise en cause de la hiérarchie stricte au sein des organisations.

Pour lui si les passéistes, les conservateurs redoutent cette mutation rapide, les métiers du numérique amorcent l’évolution des communautés de travail de demain.

Il a identifié  trois enjeux conséquents à l’impact du numérique :

  • Le rôle de l’Etat, qui s’immisce dans tous les dossiers, devrait être d’anticiper cette mutation. Ce qui est dramatique, c’est la faillite de l’Etat dans ce rôle et ce sont les entrepreneurs qui apportent désormais des solutions concrètes. L’enjeu est de pouvoir répondre à l’accroissement des besoins en matière de ressources des entreprises ?
  • Comment faire en sorte que les modalités de travail soient utiles autant au collectif qu’à l’individu ? Comment chacun pourra s’épanouir dans ces nouvelles formes de collectif ?
  • Où est le pouvoir aujourd’hui ? la position de force ne semble plus être le monopole du donneur d’ordres. Nous sommes dans le numérique dans une forme de Terra Incognita proche de celle de Christophe Colomb

Enfin, Patrick Levy-Waitz a réaffirmé la nécessité d’éviter un écueil : Comment ne pas appauvrir les individus ? Comment construire ce nouveau modèle de progrès social, comment inventer de nouvelles protections ? Comment éviter les défauts du modèle américain qui n’accompagne pas les plus modestes et le modèle allemand qui s’organise autour de mini-jobs et des travailleurs pauvres ?

Stéphane Boukris, co-fondateur d’ES Numérique et du Concours du Meilleur Développeur de France (MDF)

M. Boukris a présenté son concours du MDF et ses activités de RH en matière d’expert du numérique.

Il témoigne de sa chance de voir défiler dans ses bureaux des créatifs, tous les profils du web, et utilise également le terme de Terra Incognita et même d’ Eldorado.

Il a opéré un parallèle entre deux « familles » de métier qu’il connait : la famille artistique et la famille numérique.

Son expérience lui a fait dire que la famille artistique séduisante de l’extérieur est en réalité  peu ragoutante de l’intérieur. A contrario, la famille numérique est beaucoup plus saine de l’intérieur : elle est beaucoup plus directe et franche. Un grand investisseur peut vous répondre directement, rapidement, car le secteur porte des valeurs de transmission : il a cité l’exemple d’Eric Bennephtali, créateur de références mondiales sur les loteries en ligne qui continue à s’intéresser aux initiatives qui émergent.

Boris Sirbey, fondateur de MyJobCompany

Le fondateur de ce site, proposant une solution de recrutement participatif, a débuté son propos en dévoilant sa collaboration avec Pôle Emploi à l’initiative du ministère du Travail qui cherchait des orientations innovantes en matière de recrutement.

Il a également évoqué la tendance des Etats à considérer que les chômeurs n’ont pas d’utilité. M. Sirbey a fait référence à l’initiative de Philippe Starck qui avait cherché à organiser un programme d’intelligence collective émanant des chômeurs.

Pour Boris Sirbey, la question ne se pose plus au niveau de l’existence des technologies : le champ des possibles technologiques est d’ores et déjà immense mais la réalité c’est que les appropriations avancent lentement. Il a avancé plusieurs pistes pour que les citoyens s’approprient plus facilement  les mutations: recrutement sans CV, cloudworking, travail distribué, formation par les MOOC

Enfin, dernier enjeu : comment « mettre de l’huile » dans les politiques de RH ? Selon lui, trois leviers doivent être aujourd’hui activés :

  • Comment moderniser les matrices RH : besoin de changer les outils et les logiciels des RH construits sur des critères obsolètes
  • Comment faire évoluer les DRH eux-mêmes : ces dirigeants censés optimiser le potentiel des équipes sont parfois pétris de convictions mais doivent retrouver du sens à l’évolution de leurs équipes ?
  • Comment faire évoluer les chefs d’entreprise : ces entrepreneurs ne sont pas forcément sensibilisés aux nouvelles formes d’emploi et de recrutement. Ils ne s’interrogent pas sur la viabilité du modèle du CV.

Pour Boris Sirbey, nous atteignons désormais un moment de basculement radical qui atteint l’ensemble de l’Europe. L’initiative de la Commission européenne « Grand Coalition for Digital Jobs » a permis de faire émerger que les enjeux et les problématiques de transformation des ressources humaines touchent désormais tous les pays européens.

Bertrand Favre, créateur de BiTWiiN.com, site spécialisé dans l’emploi des seniors

Cet entrepreneur a présenté son expérience : de formation initiale en management, il a décidé de créer une plateforme de mise en relation entre seniors et recruteurs.

Pour M. Favre, le digital produit une capacité voire une obligation à « s’inventer expert », à se donner de la visibilité.

Pour lui, la relation numérique n’est pas une fin en  soi : la vie réelle, l’implantation et la proximité doivent concrétiser un passage de témoin au-delà de la relation virtuelle.

 Voir aussi son interview pour la fondation ITG

Réactions de la salle :

Laurence Leseur, consultante CRM et développement des ventes Cross-Canal :

Elle précise, en réaction aux interventions, que le faire-savoir devient aussi important que le savoir-faire.

Pour cette spécialiste des ensembles complexes, se crée un véritable réflexe d’e-reputation, chaque nom semble être devenu une marque.

Pour cette consultante, la recommandation par les clients et les paires reste nécessaire pour parachever la visibilité permanente.

Omer Pesquer, consultant-formateur culture+numérique :

Pour cet expert du numérique dans les univers culturels et des musées qui a fédéré une communauté d’experts dans ce secteur, il faut moduler le constat de Révolution digitale, celle-ci étant annoncée sans cesse depuis qu’il a débuté en 1989.

Si la numérisation s’accélère, il ne la qualifie pas de révolution mais plutôt une mutation d’ailleurs plus longue que prévue. Il constate qu’il s’agit d’une globalisation progressive des réflexes et des pensées.